Bienvenue dans l’aristocratie des médiocres


Et si en politique comme dans les entreprises, les médiocres avaient pris le pouvoir ?

Sous le règne de la médiocratie, la moyenne devient une norme, le compromis domine : idées et Hommes deviennent interchangeables.

Nous sommes en pleine révolution rétrograde. Celle qui nous invite à nous situer toujours au centre, à penser mou, à mettre nos convictions dans notre poche de manière à devenir des êtres interchangeables, faciles à ranger dans des cases. Surtout ne rien déranger, surtout ne rien inventer qui pourrait remettre en cause l’ordre économique et social.

Tour à tour grotesques, arrogants, carriéristes, les incapables sont aux manettes. La situation est arrivée progressivement, en 20, 30 ans, petit à petit pour désormais en être la norme.

Jeff Bezos, Elon Musk et tant d’autres incarnent à la perfection la mégalomanie de cette classe dirigeante plus que jamais hors sol, avide de s’assumer au grand jour, applaudie en tout lieu, véritables « business friendly » du capitalisme.

Face aux multiples crises qui rendent l’avenir de l’humanité toujours plus incertain et à tout le moins précaire, la seule réponse à disposition des élites économiques et politiques est l’outrance et le mépris. Une sorte de « tyrannie des bouffons » titre de l’ouvrage publié en 2020 par Christian Salmon. Il nous rappelle étant en cela dans la lignée de Michel Foucault que le grotesque est l’un des procédé phares nécessaire à la souveraineté arbitraire.

Qui se souviens que Bruno Lemaire, alors qu’il était candidat à la primaire à droite en 2017 avait laisser échapper « mon intelligence est un obstacle » ?

Qui se souviens de Gilles Le Gendre, alors président du groupe parlementaire présidentiel avoir déclaré en plein mouvement des gilets jaunes « notre erreur est probablement d’avoir été trop intelligent, trop subtils ?

Les exemples pourraient être cités à la pelle.

Autrement dit : la faute incombe toujours aux subalternes, incapables de comprendre ce qui est bon pour eux et qu’il faut ramener dans le droit chemin.

Cette vision de la politique n’est pas neuve. Elle postule que seules certaines personnes sont aptes à diriger, que leurs dispositions les autorisent à accéder au pouvoir et à y rester.

Comment ne pas se remémorer ce poème ce poème de Bertolt Brecht, «  Ne serait-il pas plus simple alors pour le gouvernement de dissoudre le peuple et d’en élire un autre ? » 

Quant aux raisons qui expliqueraient la promotion d’individus grotesques aux plus hautes fonctions politiques depuis que le monde est monde, il faut probablement revenir à Aristote qui insistait sur la nécessité, pour une cité, de disposer d’une classe moyenne nombreuse, qui serait en mesure de faire contrepoids aux passions trop violentes des plus pauvres et des plus riches .

Le philosophe grec, dans son constant souci de l’équilibre, chérissait en effet le juste milieu, garde-fou selon lui contre les extrêmes. Tout ce qui se situe dans la moyenne ferait pencher la balance et empêcherait les excès contraires . Ainsi naquit probablement la social-démocratie chère à François Hollande et tant d’autres. Mais cette éthique de la modération promue par Aristote n’est-elle pas surtout destinée à assurer la stabilité d’un ordre politique déjà établi ? Aussi l’injonction à demeurer dans la moyenne aurait pour principale fonction d’inciter les citoyens à ne pas faire de vagues et à cadenasser par et pour eux-mêmes l’ordre social. Et c’est là que l’on rentrerait dans la « médiocratie », soit un monde – le nôtre – qui a fait de la moyenne une norme impérieuse. Sa logique consiste à faire travailler les gens à un rythme moyen, à établir l’ordre des connaissances escompté selon une certaine moyenne, à inculquer des méthodes qui tiennent d’un corpus moyen… 

Cette moyenne est purement idéologique.  Les sujets prennent sur eux de pratiquer la standardisation. Que ce soit sur un mode aliéné, ou fier, ou actif, ou coercitif et honteux, les sujets sont invités à intérioriser ce qui apparaît plus ou moins clairement de la part du pouvoir comme des cibles, des attentes, des comportements types, des attitudes, des buts… L’objectif reste que les “parties prenantes”, comme on dit, se vivent comme des sujets actifs et volontaires dans l’élaboration du monde qui les enchaîne.  

Tous, de Jeff Bezos, Elon Musk au gardien d’immeuble en passant par la professeure d’université, nous serions soumis aux intimidations de la médiocratie qui tente de naturaliser l’ultralibéralisme et le darwinisme social. Et comme dans n’importe quelle aristocratie, ceux qui s’en sortent le mieux sont ceux qui jouent le jeu et qui épousent ces standards de manière à tirer le meilleur parti de la conjoncture, aussi funeste soit-elle.

Bienvenue donc dans l’aristocratie des médiocres. 

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